Effets d’écriture
Effets d’écriture
Wang Zhiyuan est chinois, né à la fin des années cinquante, la première partie de sa vie appartient au système maoïste et à la Révolution Culturelle. La deuxième partie se décide en 1980 quand il rentre à la Central Academy of Fine Arts (CAFA) de Pékin. Wang Zhiyuan est contemporain des grands changements politiques intervenus à la mort de Mao et du mot d’ordre lancé par Deng Xiaoping : « enrichissez-vous ». Depuis, Wang Zhiyuan essaie de saisir par l’image la métamorphose de la société chinoise. Avec ironie, il interroge le nouveau système qui formate l’imaginaire. Il l’appelle « the new-cheap-capitalism » et met en scène les slogans « bigger, better, cheaper » ainsi que le marketing de combat qui y correspond.
A la manière de Mao qui compara les chinois à de modestes moineaux, Wang Zhiyuan associe ses « frénétiques compatriotes » à des mouches qui, attirées par la lumière et la chaleur, s’agglomèrent aux mêmes endroits. Se référant également à l’adage chinois « pour se garder au chaud il faut rester l’un contre l’autre », il monte l’installation « close to the warm » qui pourrait être vue comme une version extrême-orientale du mythe de la caverne de Platon.
Dans le travail de Wang Zhiyuan, il y a le pouvoir des mots et leurs finalités magiques, c’est la raison pour laquelle ODRADEK s’y intéresse. Durant son séjour à Bruxelles l’artiste produira des installations constituées d’une multitude de blocs en papier composés de deux caractères chinois. Ces « pavés-mots » représentent soit des émotions positives, soit des émotions négatives. Ils nous posent la question de savoir si nos émotions ou affects sont guidées par un système qui nous dépasse ? Ainsi, les systèmes algorithmiques, de plus en plus présents, peuvent-ils avoir une incidence sur nos sentiments ? Est-on totalement sondable? Nos désirs peuvent-ils êtres manipulés ?
Les différentes installations de Wang Zhiyuan chez ODRADEK mettent en scène l’impact de l’écriture et du langage sur notre comportement. Elles questionnent notre système de représentation dans son ensemble. Comme des insectes attirés par la lumière et sa chaleur nous trouvons grand confort à suivre les mêmes leurres.
L’anthropologue, Michel Leiris, écrivait qu’« Une monstrueuse aberration fait croire aux hommes que le langage est né pour faciliter leurs relations mutuelles. »
Simone Schuiten