Traces
Qiabo Ni et Simone Schuiten
La saisie d’une trace est une preuve d’interaction entre la nature et la culture. Cette interaction permanente comprend toute l’histoire humaine ainsi que toutes les variétés intellectuelles et artistiques créées par l’homme. Ce dialogue entre l’homme et son environnement est, à travers le pinceau dans la tradition chinoise, représentatif d’une esthétique en accord avec la nature. D’autres formes d’expression, différentes en apparence mais infiniment comparables, s’illustrent dans la civilisation occidentale.
Invitée chez ODRADEK, Marie Schuiten a développé une réflexion photographique sur la rencontre entre les traces naturelles des ‘pierres de rêve’ chinoises et les ‘dessins de sable’ abandonnés par l’océan Atlantique sur les plages. Suivant le dialogue interculturel, fil conducteur de la galerie, la photographe nous propose de porter notre regard sur des cycles naturels qui, laissant des traces écrites par ses sédiments nous invitent à lire de manière à la fois sauvage et civilisée.
Le rythme et l’énergie de la mer, associés au mouvement du vent et au réseau astral, produisent la marée qui, glissant sur le sable, matérialise un dessin. Il ne s’agit pas forcement d’une représentation puisque rien n’est définitivement formalisé. Cependant, la présence de ces traces induit la rencontre entre l’homme et la nature. Une rencontre dans le sens d’une association ou une participation que l’artiste tente en poursuivant le dialogue entre tous les éléments participant à ce qui se manifeste et s’expose devant elle.
Marie Schuiten se rend réceptive à cette correspondance d’éléments cosmiques perméables à la lumière naturelle et à celle de son objectif. Tout comme un lettré chinois avec son pinceau, elle trace ainsi, grâce à son appareil de photos, de nouvelles combinatoires de la nature et de la culture qui se déclinent au gré de son émotion et de son imagination créatrice.
De ce premier dialogue avec des dessins de sable, la photographe ouvre de nouvelles perspectives en se confrontant cette fois à d’autres ‘créations’ telluriennes. Il s’agit des pierres de rêve, qui sont considérées comme une forme de traçage captée cette fois-ci par la nature même et qui sont appréciées dans la culture chinoise pour le tracé naturellement ‘esthétique’ de ses veines.
Ainsi, la trace et le tracé tissent la frontière entre deux mondes : d’un côté, l’homme ; de l’autre, la nature.